Livre d’Audric Gueidan pour construire une console open-source

Bonjour Audric, pourrais-tu te présenter un peu stp ? Quel est ton parcours ?

Alors je viens du monde de l’audiovisuel à l’origine, j’ai fait des études de cinéma et je travaillais dans le milieu, à la fois dans la technique (tournage, montage) que dans l’organisationnel (gestion d’un cinéma, organisation de projection etc). Et rapidement je suis allé vers la médiation numérique, d’abord en passant par le cinéma (en accompagnant des jeunes à faire de la vidéo, à réaliser des courts métrages), puis en m’intéressant globalement aux outils permettant la liberté d’expression (réalisation de podcast, écrire de blog). Et puis j’ai ensuite travaillé dans le monde des bibliothèques et des fablabs, dans l’accompagnement des compétences numériques et dans la création d’objets. Je suis de nouveau indépendant et j’utilise toutes ces différentes expériences pour proposer des formations et sensibiliser le public sur différentes thématiques. Je me suis beaucoup penché sur les questions liées à la protection des données personnelles.

makers
Makers

Comment as-tu découvert le monde du logiciel libre ?

J’ai eu un aperçu du monde libre en 2005 lorsque ma sœur m’a fait essayer Ubuntu. À l’époque je n’ai pas été convaincu. C’est presque 10 ans plus tard que j’ai vraiment eu ma « révélation ». Cela faisait déjà un an qu’on parlait d’Edward Snowden et je commençais à m’intéresser au personnage. En même temps, je rencontrait des collègues bibliothécaires qui militaient pour le Libre et le droit à la copie. De nouveaux sujets s’ouvrent à moi. C’est notamment un de mes collègue qui m’a parlé de Framasoft. Depuis, j’ai plongé dans ce nouveau monde et à mon tour j’en parle autour de moi. Je suis devenu fervent défenseur du libre.

D’où vient cette envie de contribuer, de participer à ce mouvement ?

Je pense que c’est valorisant de se dire que notre contribution, aussi petite soit elle, peut aider quelqu’un d’autre. Encore plus quand on a pas de grosses compétences techniques. C’est d’ailleurs l’un des objectifs des contribateliers (lancé par Framasoft notamment) : on explique aux gens qu’il y a beaucoup de manière de contribuer : en parlant des sujets, en traduisant des textes, en notant les bugs, en prenant des photos. Pas besoin de savoir coder. Et le monde de contribution était déjà lié à mes pratiques professionnelles. En fablab, on doit documenter ses projets, on fait des tutoriels, on explique comment ça fonctionne, de manière à ce que quelqu’un d’autre dans le monde puisse s’approprier notre idée, notre projet. On est déjà dans un monde de partage. Et dans les bibliothèques, on est au cœur d’un lieu où on partage de l’information, des pratiques et des compétences.

couverture livre
Couverture du livre

Tu as récemment publié le livre « Construisez et programmez votre console de jeux open source« . D’où t’es venu cette idée, quelle en est la genèse ?

Fin 2018, l’éditeur Third Editions, spécialisé dans le monde du jeux vidéo, lance un concours d’écriture ayant pour thème “console de jeux”. Je commence à écrire sur L’Histoire des consoles open source car je réalise que personne n’en parle (ni en France, ni ailleurs). Les seules fois où j’ai pu lire des petits articles sur le sujet, on parlait juste de la faible résolution de l’écran ou du fait qu’il faut coder ses jeux. Rien sur la philosophie de projets comme ça.
Ma proposition d’ouvrage n’est pas retenue mais je prends néanmoins contact avec d’autres éditeurs spécialisés jeux vidéo pour proposer mon projet. Je reçois quelques réponses, le sujet intéresse mais est considéré comme “trop marginal”  ou “trop borderline”… Preuve qu’il est nécessaire d’en parler et de démystifier des idées, notamment autour de l’open source et du libre, car certains y voient des possibilités d’illégalité (je pense notamment à cause des ROM et de l’émulation, mais ce n’est pas le sujet du livre).
En avril 2019, je renvoie mon projet éditorial à des maisons d’éditions moins spécialisées dans le jeux ou le numérique, mais ayant des collections axées sur le sujet. Les éditions Dunod me répondent et me proposent de changer l’axe de mon livre et d’ajouter une dimension technique, pour concevoir pas à pas une console open source. L’idée me semble pertinente. Après quelques aller retours, le projet est validé.

Je suppose qu’il t’as fallu faire beaucoup de recherches afin de rédiger tout cela ? C’est certainement un travail de longue haleine ?

J’avais suivi les campagnes de financement de plusieurs projets de consoles opensource, et j’avais même fait la traduction du dossier de presse d’une des consoles. J’étais en contact avec certains développeurs donc j’ai facilement pu leur poser des questions. Et comme c’est finalement un petit milieu, tout le monde se connaît. Pour la partie « histoire », j’ai donc réalisé des interviews et rassembler tous les éléments que j’avais déjà trouvé en ligne. J’ai ensuite pu faire une chronologie de tout ça. Pour la partie technique du livre, cela m’a demandé en effet plus de temps. J’ai du refaire l’ensemble des projets moi-même (pour prendre les photos), étapes par étapes. Mais c’est surtout sur la partie code où j’ai du réfléchir. La magie du monde de l’open source permet facilement de trouver les sources, mais j’ai du ensuite digérer tout ça et essayer de le rendre plus accessible pour quelqu’un qui est étranger à tout ça. C’est un travail de vulgarisation. Au total, j’ai mis presque 2 ans pour aller au bout de ce projet de livre.

Ce livre mêle open source, DiY et programmation, c’est ambitieux comme projet, mais aussi très intéressant. Quel est ton but avec cet ouvrage ?

J’avais surtout envie de parler jeux vidéo, de faire le lien avec le monde des maker, de montrer que cela reste accessible (financièrement et techniquement) et que tout le monde peut se mettre à assembler des consoles en kit, ou coder un petit jeu. J’ai l’impression d’avoir fait un pont entre l’histoire du jeu vidéo et l’histoire des hacker/maker. Et puis ça mélange deux de mes passions, donc pouvoir écrire sur le sujet, c’est super. J’espère que la communauté appréciera mon travail.

consoles open source
Consoles open source

Sans tout dévoiler, quels sont les principaux sujets abordés, n’y a-t-il que de la technique ?

Il y a certes beaucoup de technique mais le tout est entremêlé de l’histoire des consoles open source : à quel moment ça a commencé à être visible pour le grand public, comment les créateurs se sont inspirés les uns des autres, comment des entreprises ont vu le jour, comment d’autres se sont écroulées. Je parle de Raspberry et Arduino (ces fameuses cartes très appréciées des bidouilleurs), mais aussi de projet plus originaux, plus « pro ». Niveau technique, il y a différents projets qui permettent de vraiment mettre les mains dedans, ou, si on est un peu plus frileux, de rester à distance sans trop se mouiller.

Quel public vises-tu ? Il faut, je suppose, avoir certaines connaissances pour pouvoir tout comprendre ?

La majorité des consoles opensource ont été pensé avec un but pédagogique et éducatif. Des enfants de 11 ans peuvent se lancer dans ce type de projet. Évidemment, des adultes qui n’y connaissent rien auront également beaucoup de choses à apprendre. Et c’est encore mieux de faire ça en groupe et de mélanger les âges des participants. Pour la partie technique, il n’y a pas vraiment de pré requis. C’est bien d’avoir déjà essayé la soudure (pour éviter de brûler les composants) mais on peut limite démarrer avec un des projets que je présente. Pour la partie code, il y a aussi plusieurs niveaux. On peut aussi copier coller sans trop chercher à comprendre. Comme on a accès au code, on peut ensuite essayer de modifier des paramètres pour voir l’effet que ça produit. On peut apprendre comme ça, c’est toute la méthodologie qu’on applique dans les fablabs, celle de l’essai-erreur.
J’espère également que les amateurs de retrogaming s’intéresseront à mon livre. Je parle un peu d’émulation, mais il existe surtout tout un pan de l’Histoire du jeux vidéo méconnu du grand public.

jeux
Jeux

Un grand bravo à toi pour ce super ouvrage qui mérite d’être connu et diffusé 😉 Où peut-on se le procurer ?

Merci beaucoup pour tes questions.
On va trouver mon livre un peu partout, sur Amazon, à la Fnac, et dans des librairies. Je suis curieux d’avoir des retours des lecteurs.

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